Péguy, les canulars de l’ENS et l’« atteinte à la dignité humaine »

De l’humour. Dans les deux textes ci-après, Félicien Challaye, camarade de promotion de Charles Péguy à l’Ecole normale supérieure raconte d’abord comment Péguy a cherché à se dérober au canular à son arrivée en 1894 à l’Ecole, puis comment il a échoué à être élu chef de canular.

Je ne constatai la présence de Péguy qu’après la semaine d’innocentes brimades infligées par les anciens aux nouveaux, ce qu’on nomme en argot normalien le canular.

Pendant ces sept jours, les nouveaux, les gnoufs[1], étaient les domestiques des anciens, utilisés à transporter d’une turne[2] à l’autre les livres, les cahiers, les notes, tous les biens des carrés et des cubes[3]. Ils leur servaient aussi de jouets, en des séances récréatives dirigées par le chef de canular. Notre ahurissement amusait les normaliens quand, la nuit, ils venaient nous retourner dans nos lits ; quand, le jour, ils nous faisaient combattre les uns contre les autres à coups de traversin, ou quand ils nous conduisaient, enveloppés chacun dans un drap de lit transformé en suaire, baiser la dernière vertèbre du méga[4] ; un squelette de mégathérium, dont l’ancienneté symbolisait les plus lointaines traditions de l’école. On contait qu’il y a quelques dizaines d’années, un gnouf ayant refusé d’accomplir ce geste, qu’il jugeait déshonorant, Jaurès improvisa un magnifique discours, flétrissant cette manifestation d’un monstrueux irrespect, et exprimant l’indignation éprouvée par l’archicube méga devant un scandale dont il n’avait jamais encore été témoin…

Après plus d’un demi-siècle, bien des détails de ces pittoresques scènes vivent encore devant mes yeux. Je vois s’agiter avec une verve extraordinaire le chef de canular, le cube Feyel ; j’écoute ses mots d’esprit que rendait encore plus piquants un bégaiement léger. Je me rappelle la stupeur du petit provincial bien élevé que j’étais quand je l’entendis hurler; après la bataille aux traversins : « Le combat ayant eu lieu à l’arme blanche, il n’y a pu y avoir que des pertes de même couleur ».

Le dernier soir du canular, au cours d’une vaste assemblée, certains nouveaux devaient s’exhiber en grimpant sur un poêle, pendant que quelques anciens ; qui souvent avaient été au lycée leurs camarades, chantaient une chanson dénonçant leurs ridicules physiques ou moraux. J’entends encore le refrain de la chanson consacrée à notre camarade Albert Mathiez, dont la douceur n’était point la qualité dominante :

« C’est épatant :

Rouspétait tout le temps ».

À la fin de cette séance, le chef de canular proclamait qu’il n’y avait jamais eu de gnoufs, qu’il n’y avait plus que des conscrits[5]. Un bal animé, où les plus jeunes d’entre nous faisaient fonction de danseuses, mettait fin au canular. Puis cubes et carrés invitaient les conscrits à prendre le thé dans leurs turnes. Je fus invité par Paul Crouzet, le futur historien de la littérature, qui devait devenir inspecteur général de l’instruction publique, et qui partageait sa turne avec Gustave Téry. Sur le pas de la porte, j’entendis la grosse voix de Crouzet faire à mon sujet un calembour, que j’ai dû plus d’une fois subir : « Dans cette maison, tu travailleras, Challaye, de nécessité »…

Dans cette période de la vie normalienne, qui avait l’avantage de faire se connaître les membres des diverses promotions, et aussi les nouveaux venus entre eux, comment se fait-il que je ne remarquai point une silhouette aussi originale que celle de Péguy et qu’au contraire elle me frappa de suite après la fin de cette semaine fatidique ?

On me conta que Péguy, dès son succès au concours de l’École, avait déclaré les brimades du canular contraires à la dignité humaine, proclamé sa décision de ne point s’y plier, annoncé sa ferme résolution de casser la figure au premier des anciens venus pour le canuler ; et que l’administration, connaissant son énergie, redoutant un esclandre, l’avait invité à rester chez lui huit jours de plus.

Cette explication me parut confirmée quand j’appris que, quelques jours avant l’entrée de l’École, Péguy avait, pour exprimer son refus d’accepter le canular, convoqué en un café quelques camarades amis, dont Albert Mathiez. Celui-ci conduisit à la petite réunion son cousin et correspondant ; c’est de sa fille que je tiens ce récit.

Le bruit se répandit, parmi les normaliens, que Péguy n’avait pas comme nous subi le canular, et que l’administration avait reculé devant son énergie.

À mes yeux, comme aux yeux de tous les nouveaux, cet « on-dit » lui conféra un extraordinaire prestige, dès le début de notre vie commune.

*

(…) Une amusante agitation secoua les conscrits quand il s’agit d’élire le futur chef de canular. Il y eut de nombreux candidats. Fidèle à ses convictions antérieures, Péguy posa sa candidature en qualité d’anti-canulariste : son élection signifierait la fin d’une tradition stupide, comportant des violences attentatoires à la dignité d’autrui. Bien que ne me sentant aucune vocation pour la conduite de ces manifestations collectives, je fis aussi acte de candidat, me proclamant canulariste modéré. Personnellement, j’avais trouvé utile et pittoresque cette semaine pendant laquelle les membres des diverses promotions, mêlés les uns aux autres, arrivaient à se mieux et plus vite connaître. Je proposais de supprimer les brimades vraiment désagréables, celles qui se produisaient la nuit et troublaient le sommeil, tout en maintenant, dans l’ensemble, l’antique tradition de l’école ; idée que, dans mon affiche électorale, je symbolisai par la formule : « Ne contristons point le Méga ». (Dans le numéro de l’Illustration consacré à l’école Normale à l’occasion de son centenaire, la phrase figure sur l’image reproduisant le mégathérium, inscrite sur le socle au-dessus duquel se dresse le gigantesque squelette).

Je crois me rappeler que Péguy recueillit seulement les voix de ses coturnes, et encore. Je n’obtins pas une seule voix ! Mes camarades avaient bien apprécié l’incapacité où j’aurais été de conduire un canular ! Un des candidats avait fait une campagne animée de mots d’esprit et même de calembours : « Que fait la brebis ? Elle bêle… Votez pour lui ! ». Paul Elbel fut élu chef de canular, préludant par ce triomphe à d’autres succès électoraux et parlementaires (il devint plus tard député des Vosges, puis ministre de la Marine marchande, avant de mourir prématurément).

Félicien Challaye, Les Deux Péguy, Editions Amiol-Dumont, 1954.

[1] Ainsi appelait-on alors un nouveau reçu à l’école normale supérieure. Après avoir passé un rite initiatique (le canular), le gnouf devenait un conscrit. L’expression ne désigne plus de nos jours que tout élève de première année.

[2] La « t(h)urne » désigne une chambre de Normalien, en argot de l’école normale supérieure. Et un « coturne » est un camarade de chambre, dans le même argot.

[3] Le « carré » est un élève de deuxième année, et le « cube » est un élève de troisième année.

[4] Cette expression désigne, en argot de Normalien, le « week-end d’intégration » à l’école normale supérieure. « Historiquement, comprend-on, les élèves entrant à l’École étaient invités à se prosterner devant un fossile de Megatherium conservé à la Bibliothèque de lettres. Le fossile a depuis disparu, et le Mega, lui, s’est adapté… ».

[5] En argot de l’Ecole normale supérieure, un « conscrit » est un étudiant de première année.

La langue française et la loi. Les langues régionales dans le service public audiovisuel.

Question écrite n° 14956 de M. Jean-Luc Lagleize (Mouvement Démocrate et apparentés – Haute-Garonne ), JO, 11/12/2018, p. 11288.

Jean-Luc Lagleize interroge M. le ministre de la culture sur la place de l’occitan et plus largement des langues régionales dans le service public de l’audiovisuel. Force est de constater que la présence de l’occitan et des autres langues régionales, à l’exception du corse, sur les ondes de France Télévisions reste minime. Selon le « Rapport au Parlement sur l’emploi de la langue française », remis en décembre 2017 par le ministère de la culture, seules 50 heures de programmes en langue occitane ont été diffusées en 2016 (contre 70 heures en 2015). Le rapport note également une diminution marquée pour toutes les langues régionales confondues. Pourtant, France Télévisions est tenu, sous le contrôle du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), de respecter les missions de service public inscrites à son cahier des charges, dont l’article 40 prévoit que l’entreprise « veille à ce que, parmi les services qu’elle édite, ceux qui proposent des programmes régionaux et locaux contribuent à l’expression des principales langues régionales parlées ». Par ailleurs, l’article 75-1 de la Constitution de la République française prévoit que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Ainsi, la diffusion des langues régionales devrait correspondre à une volonté forte de France Télévisions de valoriser les productions locales et d’accroître le lien de proximité avec les téléspectateurs en tenant compte de leur quotidien et de la richesse des territoires. Les langues régionales faisant partie intégrante du patrimoine culturel français, leur sauvegarde et leur transmission aux générations futures est une véritable nécessité. Le projet de réforme de l’audiovisuel actuellement engagé par le ministère de la culture semble l’occasion de renforcer les exigences de cette loi pour renforcer la vocation régionale de France Télévisions. Ainsi, il souhaiterait connaître sa position sur la place des langues régionales, ainsi que les mesures qu’il entend mettre en œuvre afin de valoriser leur transmission au travers d’un service public audiovisuel de proximité.

Réponse du ministre de la Culture, JO, 26/02/2019, p. 1895.

Le ministre de la culture est particulièrement attaché à la mission de proximité dévolue au service public audiovisuel et plus particulièrement à France 3, qui participe à la vie des territoires en valorisant la richesse du patrimoine régional, ainsi qu’à l’expression des principales langues régionales parlées. Le ministre soutient par ailleurs les actions visant à promouvoir le français et toutes les langues de France. À ce titre, le ministre de la culture se félicite que, conformément à l’article 40 de son cahier des charges, France Télévisions ait proposé sur ses antennes en 2017 de nombreux programmes régionaux et locaux qui ont contribué à l’expression des principales langues régionales parlées en France. Ainsi, en 2017, 377 heures de programmes dans sept langues régionales (alsacien, basque, breton, catalan, corse, occitan et provençal) ont été diffusées sur les antennes de France 3. S’agissant plus spécifiquement de l’exposition de l’occitan, 44 heures 30 d’émissions en langue occitane ont été proposées en 2017 sur France 3 Aquitaine, France 3 Midi-Pyrénées et France 3 Languedoc-Roussillon, dont le magazine « Viure al pais occitan » de 26 minutes, diffusé un dimanche sur deux à 10h50 en Aquitaine et deux dimanches sur trois en Midi Pyrénées et Languedoc-Roussillon, ainsi qu’une édition d’information de 7 minutes (19/20 Occitan) diffusée chaque samedi à 19h20, hors zone de diffusion de l’édition locale de Perpignan. La diminution constatée en 2017 du volume de diffusion dans la langue occitane résulte principalement de l’abandon de certaines rediffusions, lié à la réorganisation des grilles de France 3. En effet, certaines cases habituellement dévolues à des programmes en langues régionales ont été modifiées en raison de programmations exceptionnelles intervenues au cours de l’année (élections législatives notamment) et de prises d’antenne exceptionnelles en régions. Ainsi, en 2017, le volume de production ou de coproduction de programmes en langue régionale occitane est resté stable par rapport à 2016. Cette situation conjoncturelle ne remet donc pas en cause la politique globale de France 3 concernant la production et la diffusion d’émissions en langues régionales. Le renforcement de l’offre régionale de proximité de France Télévisions et Radio France est l’un des axes principaux du projet de transformation de l’audiovisuel public annoncé par le Gouvernement le 19 juillet 2018. Un triplement des programmes régionaux de France 3 a été annoncé, à travers une coopération renforcée entre les équipes de France 3 et France Bleu. Ainsi, les deux réseaux régionaux produiront dans les différents territoires des offres communes à la télévision, à la radio et sur le numérique. Le déploiement de ce dispositif a fait l’objet dans un premier temps d’expérimentations afin d’abord de déterminer les modalités de collaboration les plus efficaces puis de retenir les pratiques qui auront fait leurs preuves sur le terrain. Plusieurs expérimentations ont été menées : France Télévisions et Radio France ont travaillé à la reprise sur les antennes de France 3 à Toulouse et à Nice des matinales filmées de France Bleu Occitanie et France Bleu Azur, au lancement d’une émission politique commune à France 3 Franche-Comté, France Bleu Besançon et France Bleu Montbéliard et au développement, en Bretagne et dans le Nord-Pas-de-Calais, de nouveaux projets communs innovants entre les deux réseaux. Dans le cadre de la transformation en cours de l’audiovisuel public, destinée à l’adapter à un environnement, notamment technologique, en pleine mutation, le ministre de la culture veillera à ce que le service public audiovisuel continue à diffuser des programmes en langues régionales.

La langue française et la loi. Situation du Wallisien et du Futunien.

Question écrite n° 15288 de M. Sylvain Brial (Libertés et Territoires – Wallis-et-Futuna), JO, 18/12/2018, p. 11606.

Sylvain Brial interroge M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur la situation de l’enseignement des langues locales, langues vernaculaires, dans les iles de Wallis et de Futuna. Le territoire de Wallis à sa propre langue, le Wallisien, le territoire de Futuna a sa propre langue le Futunien. Dans les familles c’est la langue locale qui est parlée. Le français est enseigné en primaire avec un quota d’enseignement de la langue locale, selon les niveaux. Il l’interroge sur les conditions dans lesquelles les langues locales sont enseignées en primaire, puis dans le secondaire. Il souhaite également savoir s’il est possible de les présenter aux examens et spécialement au baccalauréat.

Réponse du ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse, JO, 3/09/2019, p. 7866.

Le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse est attaché à la préservation et à la transmission des diverses formes du patrimoine linguistique et culturel des territoires français, et la situation de l’enseignement des langues régionales fait l’objet de la plus grande attention dans les académies et territoires concernés. La circulaire n° 2017-072 du 12 avril 2017 a rappelé d’une part cet attachement, d’autre part le cadre de l’enseignement des langues et cultures régionales. Le wallisien et le futunien font partie des langues enseignées à ce titre, et les élèves scolarisés sur le territoire de la collectivité d’Outre-mer de Wallis-et-Futuna peuvent suivre un enseignement de wallisien ou de futunien de l’école primaire jusqu’à la fin du lycée. C’est aussi parce que ces langues sont les langues maternelles des enfants, parlées dans les familles, que l’école leur ménage une place importante. Ainsi, en petite section de l’école maternelle, l’accueil des élèves se fait en langue vernaculaire, le français n’occupant que 10 % environ du temps. Puis durant les deux années suivantes, les proportions s’inversent progressivement pour arriver à un enseignement dispensé très majoritairement en français en grande section. Les professeurs s’appuient sur les acquis linguistiques des élèves en wallisien ou futunien pour développer progressivement leurs compétences linguistiques et favoriser l’apprentissage du français, langue de la scolarisation. À l’école élémentaire, entre une heure et une heure trente hebdomadaire est consacrée aux langues vernaculaires. Cet enseignement se poursuit au collège à raison d’une heure hebdomadaire. Les modalités de passation et d’attribution du diplôme national du brevet contribuent à valoriser l’enseignement du wallisien ou du futunien. En effet, à l’épreuve orale, le candidat a la possibilité de présenter en partie son projet en langue régionale. En outre, l’enseignement facultatif de langues et cultures régionales est valorisé par des points supplémentaires obtenus si le candidat a atteint (dix points) ou dépassé (vingt points) les objectifs d’apprentissage du cycle. Enfin, les candidats ont la possibilité de demander l’inscription d’une mention « langue régionale », suivie de la désignation de la langue concernée, sur le diplôme national du brevet ; cette mention est inscrite s’ils ont obtenu la validation du niveau A2 du cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) pour cette langue. Au lycée général et technologique enfin, les élèves peuvent choisir de suivre un enseignement de trois heures par semaine en wallisien ou en futunien. Ainsi, environ la moitié des élèves du second degré reçoivent un enseignement de langues et cultures régionales, et 30 % des élèves de la classe terminale présentent une de ces langues au baccalauréat au titre de la langue vivante 2 ou de la langue vivante 3.

La langue française et la loi. Réforme du lycée et langues régionales.

Question écrite n° 19922 de M. Bernard Reynès (Les Républicains – Bouches-du-Rhône ), JO, 28/05/2019, p. 4896.

Bernard Reynès attire l’attention de M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur la question de l’enseignement des langues de France et en particulier du provençal. Selon l’article 75-1 de la Constitution de la cinquième République française, « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Les langues régionales sont donc des langues patrimoniales et c’est à ce titre qu’elles méritent un statut particulier, distinct de celui des langues étrangères. Il alerte M. le ministre sur l’incompatibilité fondamentale entre l’article de la Constitution précédemment cité et la réforme du lycée énoncée dans le décret n° 2018-614 du 16 juillet 2018. Plusieurs dispositions de ce décret sont dénoncées par les professeurs de provençal ainsi que par les associations régionalistes qui soulignent l’absence de la mention « provençal » dès l’intitulé de l’option et sa réduction à une langue unique, l’occitan. De plus, on ne peut prétendre concourir au maintien des langues régionales tout en diminuant leur bonification au baccalauréat, ceci toutes langues de France confondues. Or c’est bien l’objet du présent décret et ce sur quoi il souhaite alerter M. le ministre. Enfin, le nombre d’heures dévolues aux langues régionales (aussi appelé « dotation horaire ») ne doit pas, comme c’est actuellement le cas, varier selon les établissements. Les langues régionales méritent une dotation horaire fixe qui les remettrait sur un pied d’égalité avec l’offre d’enseignement des langues étrangères. Sans cela, le présent décret ne pourra qu’être néfaste pour la langue provençale et contribuer à la désaffection des élèves pour les langues régionales en général, parachevant leur disparition. Il lui demande si le Gouvernement entend revenir sur ce décret et ce qu’il compte faire pour préserver l’enseignement des langues régionales en France.

Réponse du ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse, JO, 15/10/2019, p. 8930.

Le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse est attaché à la préservation et à la transmission des diverses formes du patrimoine linguistique et culturel des régions françaises : la circulaire n° 2017-072 du 12 avril 2017 a ainsi rappelé d’une part cet attachement, d’autre part le cadre du développement progressif de l’enseignement des langues et cultures régionales. Plus spécifiquement, les problématiques de la langue régionale occitan-langue d’oc sont prises en compte dans le cadre de la convention-cadre signée par le ministère de l’éducation nationale en janvier 2017 et applicable jusqu’au 31 décembre 2022 dans les deux régions Nouvelle Aquitaine et Occitanie. Par ailleurs, dans le cadre de la concertation pour la réforme du baccalauréat 2021, des responsables des associations des langues régionales, ainsi que des représentants de la Fédération pour les langues régionales dans l’enseignement public, comprenant généralement un représentant de la FELCO, ont été reçus. La réforme du baccalauréat et du lycée, entrant en vigueur pour les élèves de première à partir de la rentrée 2019 et pour les élèves de terminale à partir de la rentrée 2020, est cadrée par les arrêtés du 16 juillet 2018 relatifs à l’organisation et au volume horaire des enseignements du cycle terminal des lycées, sanctionnés par le baccalauréat général et portant organisation et volumes horaires des classes de première et terminale des lycées sanctionnés par le baccalauréat technologique. Pour le baccalauréat général, il sera toujours possible pour le candidat de choisir une langue vivante régionale (LVR), dont l’occitan-langue d’oc, en tant qu’enseignement commun au titre de la langue vivante B, et également en tant qu’enseignement optionnel, au titre de la langue vivante C. En ce qui concerne la voie technologique, dans toutes les séries, le choix d’une langue vivante régionale dont l’occitan-langue d’oc, demeurera possible au titre de la langue vivante B dans les enseignements communs. Pour l’enseignement optionnel de la voie technologique, le choix d’une langue vivante régionale dont l’occitan-langue d’oc sera toujours proposé dans la série « Sciences et technologies de l’hôtellerie et de la restauration » (STHR) en raison de l’intérêt que comporte un tel enseignement pour des élèves se destinant à des carrières où l’accueil du public est primordial. Le rétablissement d’un enseignement optionnel dans toute la voie technologique n’est pas pour l’instant envisagé pour la LVR. En effet, compte tenu d’horaires déjà élevés en raison d’une pédagogie spécifique, très peu d’élèves choisissent aujourd’hui de suivre un enseignement facultatif. La réforme du baccalauréat conforte par ailleurs le poids des langues régionales dans l’examen. La langue vivante régionale (LVR) choisie au titre de la langue vivante B, a un poids plus important en termes de coefficient dans l’examen qu’avant la réforme. En effet, elle constitue l’un des six enseignements communs ayant exactement le même poids dans l’examen, c’est-à-dire que tous ces enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 30 % de la note finale, et en y incluant les notes de bulletin, la note de langue régionale compte pour environ 6 % de la note finale. S’agissant de la LVR choisie au titre d’enseignement optionnel comme langue vivante C, tous les enseignements optionnels ont exactement le même poids et les notes de bulletins de tous les enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 10 % de la note finale de l’examen. La situation précédant la réforme, dans laquelle seules les notes au-dessus de la moyenne étaient prises en compte dans l’examen, disparaît. Désormais, il faut suivre les enseignements optionnels en cours de scolarité tout au long du cycle terminal et la note annuelle obtenue au titre des enseignements optionnels compte pour l’examen, quelle que soit sa valeur. De plus, en vue de consolider la place et la dynamique des langues régionales dans le cadre du Bac 2021, il a été décidé d’introduire les langues vivantes régionales en tant qu’enseignement de spécialité avec un horaire de 4 heures en première, de 6 heures en terminale, et un coefficient de 16 aux épreuves du baccalauréat, comme tout enseignement de spécialité de la voie générale. Ainsi un projet d’arrêté modificatif a été présenté au conseil supérieur de l’éducation (CSE) du 6 février 2019. D’une part, il modifie l’intitulé de l’enseignement de spécialité « Langues, littératures et cultures étrangères » en « Langues, littératures et cultures étrangères et régionales » et, d’autre part, il précise que les langues concernées par cet enseignement sont les langues vivantes A ou B ou C de l’élève. Ces propositions ont recueilli un vote favorable du CSE. La valorisation des LVR pourra s’opérer grâce à l’accent mis par la réforme sur l’enseignement des disciplines non linguistiques en langue vivante, notamment régionale. Un projet d’arrêté, qui a recueilli un avis favorable en CSE en juillet 2018 et fera l’objet d’une publication prochaine prévoit ainsi que, hors des sections européennes ou de langue orientale, les disciplines autres que linguistiques (DNL) peuvent être dispensées en partie en langue vivante donc en langue régionale, conformément aux horaires et aux programmes en vigueur dans les classes considérées. Par exemple, sur 3 heures d’histoire-géographie, 1 heure pourra être dispensée en langue vivante régionale. Dans ce cas, et cela est nouveau, le diplôme du baccalauréat général et du baccalauréat technologique comportera l’indication de la discipline non linguistique ayant fait l’objet d’un enseignement en langue vivante étrangère ou régionale, suivie de la désignation de la langue concernée, lorsque le candidat a obtenu une note égale ou supérieure à 10 sur 20 à une évaluation spécifique de contrôle continu visant à apprécier le niveau de maîtrise de la langue qu’il a acquis. Enfin, une réflexion est engagée avec le CNED pour envisager une offre en langue régionale qui puisse être conçue conformément aux dispositions de l’article L.312-10 du code de l’éducation, qui prévoit que les langues et cultures régionales sont à favoriser « dans les régions où ces langues sont en usage ». Concernant la dotation horaire pour les langues régionales, ce fléchage des heures n’est pas modifié dans l’organisation du nouveau lycée. Ainsi, pour la LVB les heures déléguées par les académies sont fléchées en fonction des grilles horaires définies nationalement, tandis que pour la LVC l’établissement répond à la demande grâce à sa marge d’autonomie. Toutes ces nouvelles dispositions œuvrent en faveur de la valorisation des filières technologiques et de l’apprentissage des langues vivantes régionales pour les élèves de ces filières.

La langue française et la loi. Des anglicismes.

Question écrite n° 21208 de M. Thibault Bazin (Les Républicains – Meurthe-et-Moselle), JO, 09/07/2019, p. 6282.

Thibault Bazin attire l’attention de M. le ministre de la culture sur la nécessité de mieux défendre la langue française. En effet, on ne peut que constater le développement des anglicismes, que ce soit au sein de l’État, dans les ministères, dans les entreprises publiques mais aussi et surtout dans le monde économique et dans les supports de communication. On ne peut nier qu’une langue évolue mais il doit être possible de freiner une tendance qui n’a rien d’inéluctable. La loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française a été un premier pas mais qui semble insuffisant. Sachant que la langue française est et doit rester une part essentielle de la culture et de l’identité du pays, il lui demande ce que le Gouvernement compte faire pour accentuer la promotion de la langue française en France, en Europe et partout dans le monde.

Réponse du ministre de la Culture, JO, 21/04/2020, p. 2979.

Conformément à ses missions et aux dispositions de la loi n° 94-665 du 4 août 1994, le ministère de la culture, à travers la délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF), s’implique au quotidien pour garantir l’emploi du français dans les services publics et dans les différents secteurs de la vie économique, sociale et culturelle couverts par la « loi Toubon ». Cette loi n’a cependant pas vocation à interdire les anglicismes et la jurisprudence admet, à ce titre, l’emploi ponctuel de termes étrangers courants. Des obligations plus restrictives s’appliquent en revanche aux services et établissements de l’État, ainsi qu’aux marques et aux contrats publics. Pour garantir l’application de la loi, la DGLFLF intervient régulièrement au moyen d’actions de rappel à la loi ou de sensibilisation en direction des acteurs publics et privés. Au sein même des services de l’État, une réflexion est menée avec les hauts fonctionnaires chargés de la langue française et de la terminologie afin de parvenir à une meilleure information et une implication plus forte des différents ministères en matière d’emploi de la langue française. Les dépôts de marques en anglais, qui se sont aussi fortement développés dans les administrations de l’État, doivent de cette façon être mieux encadrés. Les acteurs publics et privés peuvent également s’appuyer sur le dispositif d’enrichissement de la langue française, coordonné par la DGLFLF, qui produit chaque année plus de trois cents termes destinés à permettre aux professionnels, notamment du monde scientifique et économique, de disposer de vocabulaires techniques français. Un travail est mené afin de mieux valoriser cette ressource essentielle auprès des publics concernés. Sur le plan international, le ministère de la culture contribue à soutenir l’emploi du français et le plurilinguisme dans les institutions communautaires européennes et s’implique résolument, en complémentarité avec les actions menées par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères et avec les organisations multilatérales de la francophonie, dans toutes les actions promouvant la présence de la langue française dans le monde. Le ministère de la culture est, en particulier, l’un des acteurs majeurs du plan du Président de la République « Une ambition pour la langue française et le plurilinguisme », présenté le 20 mars 2018. Il assure le pilotage et la réalisation de nombreuses mesures de ce plan, qu’il s’agisse du dictionnaire des francophones, de la place du français dans les industries culturelles et créatives et sur la Toile, ou de la diffusion de la création francophone. Il est enfin en charge du projet de création d’une Cité internationale de la langue française au château de Villers-Cotterêts.

La langue française et la loi. Enseignement des langues et cultures d’origine (ELCO).

Question écrite n° 23666 de M. Guy Teissier (Les Républicains – Bouches-du-Rhône ), JO, 15/10/2019, p. 8617.

Guy Teissier interroge M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur les enseignements de langue et de culture d’origine (ELCO). Ils sont mis en œuvre sur la base d’accords bilatéraux prenant appui sur une directive européenne du 25 juillet 1977 visant à la scolarisation des enfants des travailleurs migrants. Ces enseignements concernent les ressortissants de 9 pays : l’Algérie, la Croatie, l’Espagne, l’Italie, le Maroc, le Portugal, la Serbie, la Tunisie et la Turquie. Le principe de ces enseignements est que la maîtrise de la langue maternelle est un préalable nécessaire à la réussite de l’apprentissage d’une autre langue. Or la société française a évolué depuis les années 70 et c’est l’enseignement du français qui doit être développé, en s’appuyant sur des dispositifs et méthodes efficaces qui permettent l’apprentissage des savoirs fondamentaux. Aujourd’hui, le niveau des élèves en français n’a jamais été aussi bas selon des études internationales. Par ailleurs, le Haut conseil à l’intégration, avait demandé si ces dispositifs seraient bien supprimés afin de lutter contre le communautarisme, le repli identitaire alors que l’école de la République est là pour assurer et renforcer l’unité de la Nation. Aussi, il lui demande quand il sera mis un terme à l’enseignement des langues et cultures d’origine afin de lutter contre le communautarisme et pouvoir ainsi renforcer l’apprentissage des fondamentaux.

Réponse du ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse, 17/03/2020, p. 2150.

Les cours d’enseignement des langues et cultures d’origine (ELCO) sont des enseignements optionnels de langue vivante, créés à partir des années 1970 et proposés aux enfants des travailleurs migrants de 9 pays (Algérie, Croatie, Espagne – jusqu’en 2016-2017, Italie, Maroc, Portugal, Serbie, Tunisie, Turquie). Ils sont adossés à des conventions bilatérales et multilatérales. Ils respectent notamment la directive européenne 77/486/CEE relative à la scolarisation des enfants des travailleurs migrants. Ils sont facultatifs et dispensés par des enseignants mis à disposition par les pays partenaires et supervisés par les corps d’inspection du ministère de l’éducation nationale. Dans le cadre du plan interministériel « La République en actes », adopté en mars 2015, il a été décidé de transformer les ELCO en enseignements internationaux de langues étrangères (EILE). Un courrier a ainsi été adressé dès janvier 2016 aux ministres de l’éducation algérien, italien, marocain, portugais, tunisien et turc, afin de leur proposer de travailler conjointement à l’évolution des ELCO vers ces nouveaux dispositifs d’enseignement. L’esprit et la philosophie des EILE sont fondamentalement différents de ceux des ELCO. Tout d’abord, les EILE sont ouverts à tous les élèves, sans considération de nationalité ou d’origine. Ensuite, les EILE sont limités à 1h30 hebdomadaire. Par ailleurs, alors que les ELCO accordent une place importante à la culture du pays d’origine, le contenu des EILE tend à se rapprocher du programme des langues vivantes obligatoires à l’école élémentaire. Les compétences linguistiques sont ainsi adossées au cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) et le niveau à atteindre au bout de quatre années est le niveau A1. En outre, le suivi et le contrôle pédagogique des enseignements par les corps d’inspection concernés sont renforcés. Enfin, les enseignants intervenants doivent maîtriser le français (niveau B2). Le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse poursuit le travail engagé pour faire évoluer les ELCO. Suite à la signature de nouveaux accords bilatéraux, le Portugal est entré dans le dispositif EILE lors de la rentrée 2017 et la Tunisie lors de la rentrée 2018. Si les autres pays sont encore en phase de négociation, à des stades divers, les ELCO auront été supprimés à la rentrée 2020. Cette évolution vers l’EILE permettra de valoriser l’apprentissage des langues concernées. Elle s’inscrit dans le cadre d’une politique linguistique cohérente et diversifiée mise en œuvre dans les cartes académiques des langues et initié par le rapport établi par Chantal Manès et Alex Taylor « Propositions pour une meilleure maîtrise des langues vivantes étrangères, oser dire le monde » remis au ministre en septembre 2018.

La langue française et la loi. Tarifs des certifications en langue française.

Question écrite n° 24754 de M. M’jid El Guerrab (Libertés et Territoires – Français établis hors de France), JO, 26/11/2019, p. 10231.

M’jid El Guerrab attire l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur les certificats permettant aux étudiants étrangers de valider leurs compétences en français. Plusieurs types de diplômes existent (DILF, DELF, DALF), indépendant et sanctionnant quatre compétences langagières. Ces certifications sont essentielles pour les étudiants bénéficiant du réseau français d’écoles à l’étranger et sont demandés par les établissements d’enseignement supérieur français afin de procéder à une nouvelle inscription. À travers le monde, il existe 1 200 centres d’examen répartis dans 174 pays et les tarifs de ces tests sont souvent moins élevés que les tests comparables étrangers (TestDaf, TOEFL, IELTS). Néanmoins, le prix de ces examens demeure particulièrement important pour certains pays africains. Le tarif de ces certifications évolue selon les pays et est fixé par les postes diplomatiques. Ces prix dépassent souvent les cent euros, pour des pays au niveau de vie nettement inférieur à la France métropolitaine. À titre d’exemple, au Maroc le DALF tout public C1-C2 coûte 1 400 dirhams, soit 130 euros. C’est un poste de dépense important pour les familles qui doivent souvent ajouter le coût du trajet vers les villes qui accueillent le test. Cette situation risque de rompre l’égalité d’accès à l’enseignement supérieur entre les étudiants français et les étudiants étrangers. Il souhaite donc savoir quelles mesures le Gouvernement souhaite prendre pour démocratiser l’accès à ces tests dans les pays aux niveaux de vie les moins élevés.

Réponse du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, JO, 28/04/2020, p. 3128.

Les certifications de langue française, harmonisées sur l’échelle des niveaux de performance du Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL), sont internationalement reconnues et fréquemment utilisées par les ministères étrangers en charge de l’éducation. Elles sanctionnent la maîtrise des quatre compétences langagières : réception orale, réception écrite, production orale, production écrite. Les certifications jouent un rôle essentiel dans la promotion et la diffusion de la langue française à l’international. En 2018, 643 562 certifications ont été passées dans plus de 170 pays (les données pour 2019 ne sont pas encore connues). Le réseau de coopération et d’action culturelle dispose à travers les certifications de langue française d’un instrument de coopération de très grande qualité qu’il a intérêt à valoriser et promouvoir auprès d’un public le plus large possible. Les politiques tarifaires raisonnées adoptées par les postes diplomatiques témoignent de cet intérêt. Les certifications proposées par France Education internationale, opérateur du ministère de l’Education nationale et de la jeunesse sont de deux types : – les tests (TCF – Test de connaissance du français) répondent à des besoins ponctuels et immédiats dans le cadre de démarches administratives (mobilité étudiante, acquisition de la nationalité française). Ils proposent une photographie du niveau de compétence du candidat à un instant « T ». Ils ont une durée de validité de 2 ans. A noter que le TCF est le test linguistique requis dans la procédure de demande d’admission préalable pour l’inscription des étudiants étrangers hors Union européenne en première année dans un établissement d’enseignement supérieur français ; – les diplômes d’Etat qui s’inscrivent dans une démarche d’apprentissage pour sanctionner l’atteinte d’un niveau de compétence donné : ils valident les étapes de l’acquisition de la langue, permettant de structurer l’offre de cours du système éducatif local ou du réseau culturel français. Les diplômes sont valables à vie et bénéficient d’une reconnaissance internationale. France Education international (FEI), opérateur du ministère de l’Education nationale et de la Jeunesse, s’est engagé très tôt dans l’amélioration de ces certifications, notamment en introduisant les outils de la psychométrie. Pour consolider la reconnaissance de ces certifications, FEI, comme d’autres organismes, a fait le choix de les faire auditer pour valider la qualité des processus de production, diffusion et commercialisation (normes ISO 9001) ou encore pour privilégier une approche d’experts (label de qualité, validation par les pairs). A noter que, pour les admissions en deuxième, troisième année de licence et master, aucun texte réglementaire ne fixe un niveau exigible de maîtrise de la langue française pour les étudiants étrangers, chaque université étant souveraine en la matière. S’agissant des coûts : – Il est important de noter que les personnes titulaires d’un baccalauréat français ou les étudiants issus des sections bilingues françaises figurant sur une liste établie conjointement par les ministères français de l’éducation nationale et des affaires étrangères sont dispensés de ce test. Il convient de rappeler que le prix du TCF au Maroc (1 700 DHM) est très inférieur aux prix pratiqués par le British Council par exemple pour sa certification phare qu’est l’IELTS (2 500 DHM). Par ailleurs, les détenteurs du diplôme d’études en langue française (DELF) de niveau « B2 », dont le prix est, au Maroc, de 900 DHM sont dispensés du passage de ce test. – Pour les diplômes, les tarifs sont fixés localement par les services culturels de l’ambassade de France. Le tarif candidat est établi en fonction d’un certain nombre de paramètres. L’analyse des plans certifications élaborés par les postes en 2017 et 2018 a montré que les postes développent une politique tarifaire stratégique visant à renforcer l’attractivité de ces certifications et prenant en compte de manière explicite le niveau de vie du pays dans lequel elles sont proposées de manière à attirer un public large. Cette politique tarifaire tient compte de certains publics cibles : ainsi, des tarifs préférentiels sont accordés aux étudiants ayant un projet de mobilité ; des tarifs spéciaux sont mis en place pour fidéliser les publics des établissements du réseau culturel français à l’étranger (instituts français et/ou alliances françaises). Elle prend en considération la politique tarifaire des concurrents dans l’objectif d’un renforcement de l’attractivité de l’offre française. D’une manière générale, le prix du DELF tout public est compris dans une fourchette entre 23 et 150 euros.

La langue française et la loi. Langues régionales et baccalauréat.

Question écrite n° 25427 de M. Paul Molac (Libertés et Territoires – Morbihan ), JO, 24/12/2019, p. 11273.

Paul Molac alerte M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur les conséquences désastreuses de la récente réforme du baccalauréat sur l’enseignement des langues régionales. En effet, en plus d’instaurer des épreuves rénovées, la réforme a mis un terme aux séries L, ES, S. Pour rappel, auparavant, au sein de la série L, il était possible de choisir la langue régionale comme LV2, à l’écrit comme à l’oral, avec un coefficient 4 représentant un peu plus de 10 % de la note finale. Ce coefficient était doublé si l’élève choisissait l’enseignement dit approfondi ; et la langue régionale pouvait par ailleurs être choisie comme LV3. Dans les autres séries (ES et S et voie technologique), la langue régionale pouvait être choisie, mais en LV2 seulement, et avec des coefficients nettement moins avantageux. Malheureusement, avec la nouvelle réforme et la fusion des anciennes filières, c’est une harmonisation par le bas qui s’est opérée à l’encontre des langues régionales. La nouvelle réforme conserve la LV2 (désormais appelée LVB), et elle seule, dans le cadre des enseignements communs, sur le mode du contrôle continu, avec un coefficient qui ne représente plus que 6 % de la note finale. Quant à la possibilité de choisir la langue régionale en LV3 (LVC dans la terminologie nouvelle), cette possibilité ne s’inscrit plus dans le cadre des enseignements communs jusqu’ici possibles en série L, mais uniquement comme enseignement optionnel, en concurrence avec quatre autres options. Par ailleurs, dans la voie technologique, cela n’est autorisé que pour une filière qu’est celle l’hôtellerie et restauration. Autre nouveauté : avec la réforme il n’existe plus qu’une option facultative pour les langues et cette seule option possible n’a plus d’attractivité en ce sens qu’elle ne représente que 1 % de la note finale et qu’elle peut même faire perdre des points, ce qui n’était pas le cas précédemment. De plus, comme elles le faisaient depuis deux années, les associations de promotion des langues de France demandent à ce que le coefficient soit aligné sur celui dont bénéficient les langues anciennes (coefficient 3). Cette demande n’a jamais été prise en considération. Pire, dans la réforme proposée, non seulement les langues anciennes conservent leur coefficient, mais elles se trouvent la seule option cumulable avec une autre, laissant complètement pour compte les langues régionales. Pourtant, la Constitution, par la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 portant modernisation des institutions de la Ve République qui affirme que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France », devrait confirmer la volonté institutionnelle d’œuvrer pour la préservation et la valorisation des langues régionales. D’ailleurs, les chiffres le prouvent : avec la réforme du baccalauréat, la baisse des effectifs en langues régionales dans les lycées est brutale. Pour ne prendre que deux exemples : dans l’académie de Toulouse, sept lycées viennent de supprimer les cours d’occitan sur les 42 où il était enseigné avant l’été 2019, ce qui représente une baisse de 16 %. En Bretagne, la chute des effectifs est également saisissante en ce qui concerne l’enseignement optionnel : le nombre d’élèves de seconde est passé de 48 à 29 cette année en lycées publics. C’est pourquoi il demande au Gouvernement de respecter la Constitution, la « loi Peillon » qui stipule que l’enseignement des langues régionales doit être favorisé et les conventions signées par l’État afin de stopper ses politiques « linguicides ». A contrario, il lui demande d’opter en faveur de politiques linguistiques porteuses d’espoir pour l’avenir des langues régionales, et plus précisément visant à assurer leur survie.

Réponse du ministre de l’Education nationale, 24 mars 2020, p. 2359.

Le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse est attaché à la préservation et à la transmission des diverses formes du patrimoine linguistique et culturel des régions françaises : la circulaire n° 2017-072 du 12 avril 2017 a ainsi rappelé, d’une part, cet attachement, et d’autre part, le cadre du développement progressif de l’enseignement des langues et cultures régionales. Lors de la concertation pour la réforme du baccalauréat, des responsables des associations des langues régionales, ainsi que des représentants de la Fédération pour les langues régionales dans l’enseignement public, ont été reçus plusieurs fois. Dans le cadre de la réforme du baccalauréat et du lycée, qui entre en vigueur pour les élèves de première à partir de la rentrée 2019 et pour les élèves de terminale à partir de la rentrée 2020, l’enseignement de spécialité  » langues, littératures et cultures étrangères et régionales » (LLCER), proposé dans la voie générale, conforme à la dynamique de renforcement de la place des langues régionales, présente la possibilité de choisir une langue vivante régionale à l’instar des langues vivantes étrangères. Le choix d’une langue vivante régionale est effectué par l’élève parmi les langues suivantes : basque, breton, catalan, corse, créole, occitan langue d’oc, tahitien, conformément aux dispositions de l’arrêté du 22 juillet 2019 relatif à la nature et à la durée des épreuves terminales du baccalauréat général et technologique à compter de la session 2021. Cela est possible dès lors que l’élève suit par ailleurs un enseignement dans cette langue régionale en langue vivante B ou C. La spécialité bénéficie à ce titre d’un enseignement à hauteur de 4 heures hebdomadaire en classe de première, puis de 6 heures en classe de terminale, en plus des heures de l’enseignement commun en langues vivantes. Elle est évaluée dans le baccalauréat pour un coefficient 16 sur un coefficient total de 100. Ceci correspond à un réel progrès par rapport à la situation précédente où la langue vivante régionale approfondie ne pouvait être choisie que par une minorité d’élèves, ceux de la série L. En outre, les programmes spécifiques à l’enseignement de spécialité « langues, littératures et cultures étrangères et régionales » ont été publiés dans l’arrêté du 28 juin 2019 (BOEN du 11 juillet 2019) modifiant l’arrêté du 17 janvier 2019 (BOEN spécial n° 1 du 22 janvier 2019) pour la classe de première, et dans l’arrêté du 19 juillet 2019 pour la classe de terminale (BOEN spécial n° 8 du 25 juillet 2019), avec un programme spécifique proposé pour chacune des langues régionales précitée. A la rentrée 2019, pour la classe de 1ère, on compte 24 élèves pour LLCER breton, 20 pour LLCER occitan. Par ailleurs, pour le baccalauréat général, il est toujours possible pour le candidat de choisir une langue vivante régionale (LVR), en tant qu’enseignement commun au titre de la langue vivante B, et également en tant qu’enseignement optionnel, au titre de la langue vivante C. En ce qui concerne la voie technologique, dans toutes les séries, le choix d’une langue vivante régionale demeure possible au titre de la langue vivante B dans les enseignements communs. Pour l’enseignement optionnel de la voie technologique, le choix d’une langue vivante régionale est toujours proposé dans la série « sciences et technologies de l’hôtellerie et de la restauration » (STHR), en raison de l’intérêt que comporte un tel enseignement pour des élèves se destinant à des carrières où l’accueil du public est primordial. Le rétablissement d’un enseignement optionnel dans toute la voie technologique n’est pas pour l’instant envisagé pour la LVR. En effet, du fait d’horaires déjà élevés en raison d’une pédagogie spécifique, très peu d’élèves choisissent aujourd’hui de suivre un enseignement facultatif. A la rentrée 2019, pour la classe de 1ère, on compte 65 élèves pour LVC breton (102 pour la LVB), 272 pour LVC occitan (45 pour la LVB). Au même moment, pour la classe de seconde GT, on compte en LVB 36 élèves pour l’occitan, 110 élèves pour le breton, et en LVC 396 élèves pour l’occitan, 93 élèves pour le breton. En conséquence, la réforme du baccalauréat conforte le poids des langues régionales dans l’examen. Ainsi, la langue vivante régionale (LVR) choisie au titre de la langue vivante B constitue l’un des six enseignements communs ayant exactement le même poids dans l’examen, c’est-à-dire que tous ces enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 30 % de la note finale, et en y incluant les notes de bulletin, la note de langue régionale compte pour environ 6 % de la note finale. S’agissant de la LVR choisie au titre d’enseignement optionnel comme langue vivante C, tous les enseignements optionnels ont exactement le même poids et les notes de bulletins de tous les enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 10 % de la note finale de l’examen. La situation précédant la réforme dans laquelle seules les notes au-dessus de la moyenne étaient prises en compte dans l’examen disparaît. Désormais, il faut suivre les enseignements optionnels en cours de scolarité tout au long du cycle terminal et la note annuelle obtenue au titre des enseignements optionnels compte pour l’examen, quelle que soit sa valeur. La valorisation des LVR peut enfin s’opérer grâce à l’accent mis par la réforme sur l’enseignement des disciplines non linguistiques en langue vivante, notamment régionale. L’arrêté du 20 décembre 2018 relatif aux conditions d’attribution de l’indication section européenne ou section de langue orientale (SELO) et de l’indication discipline non linguistique ayant fait l’objet d’un enseignement en langue vivante (DNL) sur les diplômes du baccalauréat général et du baccalauréat technologique, publié au JORF du 22 décembre 2018, prévoit ainsi que, hors des sections européennes ou de langue orientale, les disciplines autres que linguistiques (DNL) peuvent être dispensées en partie en langue vivante donc en langue régionale, conformément aux horaires et aux programmes en vigueur dans les classes considérées. Par exemple, sur 3 heures d’histoire-géographie, 1 heure peut être dispensée en langue vivante régionale. Dans ce cas, et cela est nouveau, le diplôme du baccalauréat général et du baccalauréat technologique comporte l’indication de la discipline non linguistique (DNL) ayant fait l’objet d’un enseignement en langue vivante étrangère ou régionale, suivie de la désignation de la langue concernée, si par ailleurs le candidat a obtenu une note égale ou supérieure à 10 sur 20 à une évaluation spécifique de contrôle continu visant à apprécier le niveau de maîtrise de la langue qu’il a acquis. Enfin, la ressource enseignante en langues vivantes régionales est pérennisée. L’enseignement des langues régionales dans le second degré dispose de professeurs titulaires du CAPES langues régionales (basque, breton, catalan, créole, occitan-langue d’oc) et du CAPES section tahitien, ainsi que du CAPES section corse. Une agrégation de langues de France a été créée en 2017, cette disposition permettant de recruter des IA-IPR de langues de France. Le suivi de la mise en œuvre de la politique des langues vivantes régionales au niveau académique est assuré par des chargés de mission, au statut divers, dont des enseignants. Toutes ces nouvelles dispositions œuvrent en faveur de la valorisation de l’apprentissage des langues vivantes régionales pour les élèves du lycée général et technologique.