Isaac Moumé-Etia, Les Fables de Douala… en deux langues : français-Douala, Bergerac : Imp. générale, 1930, 98 p.
Isaac Moumé-Etia, Les Fables de Douala… en deux langues : français-Douala, Bergerac : Imp. générale, 1930, 98 p.
Il y avait beaucoup de monde au Musée de la Musique-Philharmonie de Paris, pour le vernissage de l’exposition consacrée à Fela Anikulapo-Kuti créateur du style musical qu’il a baptisé «afrobeat». Une exposition promise à un très grand succès de fréquentation française et européenne.
Devenu une figure d’envergure mondiale dès la fin des années 1970, l’artiste pour qui « la musique est l’arme du futur » a enchaîné les tournées internationales jusqu’à son décès en 1997. Fela a fait de son mode de vie un manifeste. L’exposition rend compte de ses engagements et de ses prises de position fracassantes, tout au long de sa carrière artistique, contre la corruption des élites et le néocolonialisme qui continuent encore aujourd’hui d’inspirer les luttes au Nigeria et ailleurs.
L’exposition propose au visiteur de revivre l’énergie de Fela et de ses musiciens et danseuses en redonnant vie aux plus grands moments de ses concerts sur les scènes du monde au rythme de morceaux hypnotiques entrecoupés de harangues politiques et de performances rituelles. En constante mutation, l’afrobeat des Koola Lobitos, la première formation de Fela, doit également beaucoup au highlife ouest-africain et donne la part belle aux cuivres et aux percussions. Avec ses groupes Afrika 70 puis Egypt 80, Fela s’entoure d’un nombre croissant de musiciens et donne naissance à des constructions symphoniques de plus en plus complexes. L’exposition raconte ce cheminement et la trajectoire musicale de l’artiste, donnant à entendre et à comprendre les sources et l’évolution de l’afrobeat.
Commissaires de l’exposition : Alexandre Girard-Muscagorry, Mabinuori Kayode Idowu, Mathilde Thibault-Starzyk. Conseiller musical : Sodi Marciszewer.
Louis-Ferdinand Céline – 1er mai 1917 – Retour d’Afrique
Le 1er mai 1917, le RMS Tarquah de l’Affican Steamship Company entre dans le port de Liverpool, en provenance d’Afrique, avec à son bord Louis Destouches dans un très piètre état. Il a vingt-deux ans et vient de passer un an au Cameroun, protectorat allemand occupé par les Anglais et les Français, au service de la Compagnie forestière Shanga-Oubangui. Après quelques mois au consulat de Londres où il avait découvert les bas-fonds et s’était même marié, le jeune réformé avait quitté l’Europe pour un poste en Afrique de « surveillant de plantations ».
Loin des combats, il suit les événements du front sur lesquels il jette un regard froid. Révolté contre les horreurs de la guerre, Louis rentrera d’Afrique avec le même sentiment d’indignation contre la condition faite aux Africains par l’Administration coloniale, qu’il exprimera avec autant de force que d’humour dans Voyage au bout de la nuit : « La chasse ne donnait guère autour du village, et on n’y bouffait pas moins d’une grand-mère par semaine, faute de gazelles.» Et ceci : « quelques tribus, extrêmement disséminées croupissaient çà et là entre leurs puces et leurs mouches, abruties par les totems en se gavant invariablement de maniocs pourris. ( ..) Peuplades parfaitement naïves et candidement cannibales, ahuries de misère, ravagées par mille pestes.» Et aussi : « La trique finit par fatiguer celui qui la manie, tandis que l’espoir de devenir puissants et riches dont les Blancs sont gavés, ça ne coûte rien, absolument rien! » Et encore : « Faut les voler avant qu’ils vous volent, c’est ça le commerce.» Enfin, pour en finir avec l’Afrique : « C’est par les odeurs que finissent les êtres, les pays et les choses. Toutes les aventures s’en vont par le nez j’ai fermé les yeux parce que vraiment je ne pouvais plus les ouvrir. L’odeur âcre d’Afrique, nuit après nuit, s’est estompée. Il me devint de plus en plus difficile de retrouver son lourd mélange de terre morte, d’entrejambes et de safran pilé. »
François GIBAULT